1900-1944
1926-1934. Ambassade de France, Pariser Platz 5, Berlin
Joseph Marrast, architecte
C'est en septembre 1860 que commence l'une des plus belles périodes de la présence diplomatique française en Allemagne. Par l'intermédiaire du prince de La Tour d'Auvergne, son ambassadeur, Napoléon III achète au numéro 5 de Pariser Platz un immeuble destiné à recevoir la légation de France. Située à l'entrée d'Unter den Linden et proche de la porte de Brandebourg, la nouvelle présence en Allemagne de l'Empire français se destine dès lors à un glorieux futur. Cependant, si l'implantation du bâtiment est prestigieuse, son état est vétuste et ses prestations médiocres. Des aménagements sont à prévoir et l'immeuble subit dès 1879 de profondes mutations, la plus visible étant l'édification, entre 1879 et 1883, d'un péristyle à colonnes qui accueille les visiteurs. Au début du XXe siècle, l'ambassade continue de se moderniser avec l'arrivée du téléphone et de l'électricité. Les ambassadeurs se succèdent et la présence diplomatique française résiste aux différents conflits qui viennent interrompre l'amitié franco-allemande.

Durant l'entre-deux-guerres, l'ambassadeur Pierre Jacquin de Margerie (1922-1931) tient à apporter une touche plus française à l'ambassade. L'architecte berlinois Bernd Hase est alors chargé, entre 1928 et 1932, de restaurer la façade et de lui apporter un aspect plus classique que baroquisant: les colonnes du péristyle s'ornent ainsi de cannelures et les tympans des fenêtres deviennent des frontispices triangulaires. L'architecte allemand s'occupe également de la construction d'une annexe dans le jardin, destinée à une partie de l'administration, et revoit la circulation entre les salles du rez-de-chaussée. En août 1932, après l'arrivée du nouvel ambassadeur André François-Poncet (1931-1938), l'architecte français Joseph Marrast est missionné, en collaboration avec Bernd Hase, pour l'aménagement de l'ambassade. Travaillant notamment sur les plans et relevés de son confrère allemand, il apporte à l'ambassade une touche un peu plus française: respectant les principes de l'architecture classique, il propose des aménagements aux compositions symétriques, équilibrées et sobres, allant jusqu'à installer de fausses portes aux murs pour amplifier hhhhhhhh
l'effet d'ensemble. L'aménagement qu'il propose du jardin est certainement l'exemple le plus parlant de cette volonté de donner à l'ambassade un visage français. Enfin, en 1934, l'ambassade connaît une dernière phase de travaux, toujours sous la direction de Bernd Hase et Joseph Marrast : tandis que le premier s'attelle à l'aménagement de l'escalier conduisant à la cave, le second prend en charge l'aménagement de la chancellerie, à l'extrémité de l'aile ouest, avec l'installation de sanitaires et l'aménagement d'une salle dédiée aux archives.

En 1933, l'ambassadeur et le personnel assistent depuis les fenêtres du premier étage à l'incendie du Reichstag. En 1938, après l'échec de la conférence de Munich pour maintenir la paix, André François-Poncet demande à quitter Berlin ; il sera remplacé par Robert Coulondre, dernier ambassadeur de France à Berlin. Le 3 septembre 1939, la France entre en guerre contre l'Allemagne et la mission diplomatique française quitte Berlin et Pariser Platz. Le 2 mai 1945, à la suite des bombardements, il ne reste de l'historique bâtiment que des ruines. Les vestiges de l'une des plus belles ambassades françaises disparaîtront définitivement en 1959.

Ce n'est qu'à partir de 1997 que la présence diplomatique française sera reconstruite sur son site historique. En effet, cette même année, Christian de Portzamparc remporte avec son équipe le projet qui se conclura par la réouverture diplomatique en l'an 2000. La reconstruction de l'ambassade s'insère dans un projet plus vaste de reconstruction de Pariser Platz, amorcé dès 1996. L'enjeu est alors de respecter le parcellaire et d'intégrer la nouvelle ambassade dans un espace déjà saturé.

L'architecte traite l'ensemble selon la notion d' « îlot ouvert », répondant ainsi à la fermeture du parcellaire encerclé par les divers bâtiments déjà construits aux alentours. La nouvelle ambassade intègre un socle en béton de manière à respecter les exigences du site historique et l'esprit qu'avait souhaité donner l'architecte responsable de l'urbanisme de Berlin au XIXe siècle, Karl Friedrich Schinkel (1781-1841).
Thérèse Kempf et Maxime Lesage
Corinne Jaquand et Bénédicte Savoy, « On danse sous les tilleuls, on danse à la Pariser Platz… », Ambassade de France à Berlin / Französische Botschaft in Berlin, Paris, Institut français d’architecture / Bund Deutscher Architekten / Ministère des Affaires étrangères, 1997